L’internat. Six jeunes adultes dans la même chambre pendant une année entière. Bien sûr, il ne s’y passe jamais rien. Il n’y a pas de pédés. Au pire, ça mate discrètement sous la douche, ça joue au strip poker parce que c’est drôle (et pas du tout parce que ça permet d’assouvir quelques fantasmes exhibitionnistes), mais ça ne va jamais bien loin.

Une nuit, une insomnie, tu te réveilles à trois heures du matin. Impossible de te rendormir. Allongé sur le dos, les mains derrière la nuque, pour passer le temps, tu écoutes les respirations régulières de tes camarades. C’est calme, apaisant. Soudain, dans l’obscurité, le bruit discret d’un drap que l’on froisse. Tu n’y prêtes pas attention. Probablement un gars qui se retourne dans son lit. Quelques instants plus tard, le même bruit. Tu tends l’oreille. Ça se répète encore. Et encore. Pas de doute, quelqu’un, quelque part, dans cette chambre, a la main qui frotte doucement, tout doucement, mais en cadence, contre ses draps. Un de tes cinq potes est en train de se branler.

Lequel ? Le bruit vient d’en face, ce n’est ni ton voisin de droite, ni ton voisin de gauche. Ce ne peut être que Jérôme, Fred ou Karim. Mais impossible de savoir lequel. L’alignement d’armoires entre ta rangée de lit et la leur t’empêchent de localiser précisément l’origine du bruit. De toute façon, ça ne t’avancerait pas à grand chose. Même pas à mieux imaginer la scène. Tu les as tous vus à poil en de nombreuses occasions, mais jamais en érection, et Dieu sait comment une queue en pleine action peut être différente de la même queue au repos.

Le bruit est régulier désormais. Au début, il ne se donnait probablement que quelques caresses ; mais il a maintenant dépassé le point de non-retour, celui où il va devoir aller jusqu’au bout. Tu imagines sa queue dure, sa main qui va et vient lentement dessus, son gland humide. Tu imagines les efforts qu’il a déployé tout à l’heure pour ôter son boxer le plus discrètement possible dans son lit, les efforts qu’il doit déployer en ce moment même pour maitriser sa respiration. La lenteur. Tout est dans la lenteur. Un geste trop brusque, un mouvement trop saccadé pourrait faire du bruit, réveiller quelqu’un et le trahir.

Tu écoutes. Tu n’as jamais été aussi concentré sur un seul de tes sens – l’audition. Tu ne peux faire que ça. Écouter. Et bander. Surtout ne pas bouger. Le moindre bruit lui ferait comprendre que tu es réveillé, que tu l’épies. Il arrêterait immédiatement. Dans l’obscurité totale, tu guettes ses changements de rythme, tu étudies sa respiration, tu essaies de deviner à quel stade il en est, tu imagines à quoi il pense.

Ca dure longtemps. Très longtemps. Pas étonnant, il se caresse si lentement. Soudain, un râle vaguement contenu, un froissement de drap un peu plus marqué. Il a fini.

Et tu restes avec ton érection, allongé sur le dos, les mains derrière la nuque, l’esprit plein d’images excitantes, encore moins capable de dormir que tout à l’heure. Tu vas devoir te branler. Tu le sais. Tu n’as pas le choix. Alors, tu commences à imaginer les efforts que tu vas devoir déployer pour ôter ton boxer le plus discrètement possible, les efforts que tu vas devoir déployer pour maitriser ta respiration.

La lenteur. Tout va être dans la lenteur.

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